samedi 17 mai 2014

The Rover - Les critiques (médias français)




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Cinematraque

The Rover démarre comme un film de Quentin Dupieux. L’action prend place, comme annoncé en prélude, à une époque indéterminée, peu de temps après un « drame » aux allures de fin du monde et dont nous ne connaîtrons jamais la teneur.

Un Robinson Crusoé au regard vide (Guy Pierce) isolé dans sa voiture garée au fin fond d’un désert australien semble attendre que le scénariste s’occupe de son cas. Il entre dans un bouiboui tenu par deux chinois silencieux, et se rince le visage. Quatre bandits en fuite se disputent dans une voiture qui roule trop vite. Ils crient et se frappent. Accident. Derrière l’homme en quête d’un but, une fenêtre donnant sur l’extérieur laisse apparaître façon travelling la voiture qui enchaîne les tonneaux.

L’homme n’y prête pas attention, jusqu’à ce que les bandits volent la sienne, de voiture. Alors il se met en tête de la retrouver.

Le décor est planté et l’intrigue, tenant sur un post-it et brillamment amenée par une mise en scène efficace se révèle des plus prometteuses. On n’a pas de mal à transposer les codes du western crépusculaire dans cette unité de lieu fantomatique au personnage principal tourmenté-solitaire-qu’il-faut-pas-faire-chier.
 

Le principal hic du film, c’est cette accumulation de bonnes idées sur le papier. Situer l’histoire dans un futur proche sans artifice, reprendre les codes du western dans une Australie aride et déserte, remplacer les chevaux par des voitures, les Indiens par des Chinois, Clint Eastwood par Guy Pierce, le lester d’un acolyte façon Jessie Pinkman (Breaking Bad) un peu attardé et joué par Robert Pattinson : on voit bien le réalisateur s’amuser avec tout ce qu’il aime, piocher dans ce qu’il préfère et laisser vivoter ses personnages piqués çà et là dans ses unités de lieux et de temps peu définies.

On comprend bien évidemment l’attachement qu’ont eu scénariste, réalisateur et acteurs de faire un vrai film de cinéma, d’user et abuser d’appels de fictions pour sans cesse relancer une intrigue au rythme faiblard et régulièrement en stand-by, du fait de sa linéarité souhaitée.

Le film ne ressemble donc à rien d’autre vu récemment. Il est un mixte de bonnes idées incompatibles. Mais lorsque Dupieux accepte volontiers de sacrifier toute cohérence narrative au profit d’une bonne idée, le réalisateur ici donne dans le compromis, au risque de frustrer le spectateur, qui ne demanderait pourtant pas mieux que de se perdre dans cette ambiance pourtant si singulière.

Note : 2,6/5

Cinemateaser

« Vous devez y tenir à cette voiture. C’est fou de s’énerver pour si peu », dit une femme au Vagabond (Guy Pearce) qui, depuis qu’un gang a volé son véhicule, n’a plus qu’une idée : retrouver les malfrats et récupérer son bien. THE ROVER conte la mission absurde d’un homme dénué de toute émotion perceptible. Pourtant, David Michôd, qui avait déjà démontré son talent pour la dissection de la complexité humaine dans ANIMAL KINGDOM, va mener le spectateur vers la compréhension de cet homme insondable. Il l’oppose à Rey (Robert Pattinson), membre du gang que le Vagabond va utiliser pour retrouver sa bagnole. Quand l’un, idiot du village, affirme sa foi en Dieu, l’autre lui rétorque : « Dieu t’a laissé avec moi qui n’en a rien à foutre de toi ». Quand le Vagabond fait montre d’un pragmatisme clinique, l’autre affirme : « Y a pas besoin d’une raison pour tout ». Grâce à cette dynamique des contraires brillamment écrite, Michôd pose sa caméra sur un Occident putréfié, dix ans après la chute de son économie. Tout en non-dit et en suggestion, THE ROVER explore un univers d’anticipation où la Chine a pris le pouvoir, où l’Australie est devenue ce que sont certains pays africains aujourd’hui – une terre riche en minerais convoités où règnent famine et misère. Un monde où l’on tue sans réfléchir, où le déclin économique s’accompagne d’une agonie effrayante de la morale et où la vie humaine, dépourvue de but, n’a plus de valeur. Incapable d’inventer un nouveau système pour fonctionner, l’Homme tourne en rond. En tirant ce portrait d’un rare nihilisme, Michôd confirme tout le talent qu’on avait décelé dans son premier film, mais renouvelle profondément son esthétique : là où ANIMAL KINGDOM jouait sur un romantisme opératique, une claustrophobie urbaine et des personnages sournois, THE ROVER abat la carte de la frontalité, se penche sur des hommes démasqués, filme la violence et la peur sans détour, use de musique bruitiste et de la lumière cramée des grands espaces pour saturer le spectateur de sensations écrasantes. Pesant et agressif, THE ROVER offre une expérience de cinéma extrême, dont on n’a pas fini de décrypter la densité émotionnelle et la précision stylistique. Ici, tout peut arriver, même un Vagabond qui fera tout pour récupérer sa dernière possession. Mais est-il vraiment un monstre ? Quel est ce remords que l’on croit déceler dans certains de ses regards ? Agit-il réellement sans but ? La réponse que Michôd offre dans toute sa crudité à la fin de THE ROVER, qu’il capte avec une immense dignité, se révèle profondément déstabilisante et bouleversante. Un film choc, un vrai.

Filmosphère

Quatre ans après l’énorme claque que constituait Animal Kingdom, David Michôd change radicalement de genre et plonge avec The Rover dans l’univers du western post-apocalyptique en mode majeur. Tous les éléments sont réunis pour construire une œuvre âpre, à l’humour très noir, aux éclairs de violence radicaux, qui laisse un goût de sang et de poussière dans la bouche.

L’Australie est le terrain idéal pour filmer des univers dystopiques et particulièrement des films post-apocalyptiques, on le sait depuis Mad Max. Et David Michôd d’enfoncer le clou avec The Rover, présenté en séance de minuit au festival de Cannes. Pure série B, qui aurait toutefois largement mérité les honneurs de la compétition tant la proposition de cinéma est ici radicale, The Rover se réapproprie un langage cinématographique situé entre le western pur et dur, plutôt du côté italien et donc considéré comme bis, et le cinéma indépendant US, avec ses personnages filmés de dos, ses lueurs solaires et ses personnages mutiques et/ou détruits de l’intérieur. Le film est à la rencontre des genres, avec également beaucoup d’éléments venus du road movie et du buddy movie. Mais autant ne pas s’attendre à des gags bien gras et des rencontres surréalistes, car David Michôd tient d’une main de fer un univers terriblement rude et désespéré, dans lequel seul compte la survie et où les hommes ont régressé au statut de cowboys sortant leur flingue pour régler le moindre petit conflit. Un western donc, car tous les codes y sont revisités, à l’image de cette séquence d’ouverture qui rejouerait presque celle d’Il était une fois dans l’ouest, à la différence près qu’elle est plus vite expédiée et que les regards fuient ceux du spectateur plutôt que de s’y plonger.

Guy Pearce, plus mutique que jamais, y incarne un homme sans nom dont le passé et les actions ne seront expliquées et justifiées qu’au bout d’une bonne heure de film. Il incarne à merveille cet homme qui répète inlassablement les mêmes phrases afin d’obtenir les réponses qu’il désire, qui ne répond jamais aux autres, au moins dans un premier temps, et qui semble en permanence sur le point d’exploser. Il y a chez lui un aspect presque ridicule, comme le souligne d’ailleurs un des rares personnages féminins du film. En effet, jusqu’au plan final, on ne saura pas les raisons qui poussent cet homme visiblement brisé par la vie à poursuivre une quête mettant souvent sa vie en jeu simplement pour récupérer sa voiture. Pourtant, la richesse du scénario, que David Michôd a coécrit avec l’acteur Joel Edgerton, est telle que son personnage n’en finit pas d’évoluer et de se dévoiler jusqu’à ce final donc, assez bouleversant. Et si l’ensemble fonctionne avec une telle harmonie, c’est que le choix de confronter des acteurs aussi différents de Guy Pearce et Robert Pattinson s’avère plus que payant. Le premier possède une sorte de sagesse, un code d’honneur et un objectif limpide pour lui, tandis que le spectateur reste dans le flou. Le second est quant à lui un simplet ne réfléchissant pas aux conséquences de ses actes, qui vit dans le moment en se posant des questions existentielles qui s’effacent dès qu’une nouvelle opportunité s’offre à lui, et qui se montre surtout très bavard. David Michôd parvient sans trop de problème à créer une empathie envers ses deux personnages pourtant fort antipathiques au premier abord. Une proximité qui fonctionne encore plus dès lors que le passé trouble du personnage de Guy Pearce est en grande partie dévoilé. Il devient alors exactement ce qu’il semblait être sans que cela ne soit dit noir sur blanc. Il est un homme qui a tout perdu, par choix, et qui en veut à la terre entière de ne plus appliquer la moindre justice digne de ce nom. L’acteur donne absolument tout ce qu’il a et livre une de ses plus belles performances, la rage suintant de chacun de ses regards, en même temps qu’un désir inavoué d’être abattu. Chacun de ses actes, du plus brutal au plus grotesque, est justifié par cette nature profondément torturée, ainsi que par la mission qui est la sienne, et qui passe par la poursuite de cette voiture qui lui a été dérobée. Ceci afin qu’il accomplisse enfin quelque chose d’important à ses yeux, une forme de justice également, qui éclaire sous un nouveau jour une séquence très émouvante dans l’arrière-boutique d’une clinique improvisée.

The Rover joue énormément sur la notion de monstruosité qu’il relativise en permanence à travers des personnages avec des gueules comme on n’en voit plus au cinéma. Des freaks, des gueules cassées, des hommes et femmes semblant sortis d’une époque bien lointaine. David Michôd fait le choix d’un film très atmosphérique, avec de longs plans, des beaux travellings, des mouvements d’une rare élégance composant une ambiance crépusculaire assez douce, traversée de part en part par des séquences d’une violence inouïe. Le réalisateur apporte son lot d’idées de mise en scène en jouant sur le choc, qu’il filme des fusillades selon un seul point de vue, sans voir dans le même plan les adversaires, créant un vrai malaise tant Hollywood nous a habitué à une grammaire toute autre, ou qu’il joue sur la rupture en filmant Guy Pearce essentiellement de dos lors de ses déplacements avant de balancer un gros plan bouleversant sur son visage cadré de face et de très près lors du dernier acte. The Rover est une œuvre tragique, pas vraiment amicale, qui bénéficie d’un humour dosé sensiblement et très étonnant tant il ne semble pas à sa place, mais c’est essentiellement une œuvre désespérée qui tend vers le portrait des derniers des hommes, même si subsistent dans le décor des éléments d’une civilisation qui fonctionne toujours (à l’image du train, qui participe à créer un univers dans lequel la présence asiatique est gigantesque). Comme tout bon western, le récit en lui-même reste relativement basique et économe en dialogues. David Michôd choisit de ne pas trop en dire, et de ne pas trop en faire dire à ses personnages, afin de stimuler l’imaginaire du public qui se fera sa propre idée sur les raisons ayant abouti à cette situation, simplement en donnant quelques petits éléments de détail disséminés ici ou là. Le film est crade, avec la photo magnifique de Natasha Braier qui accentue encore la sensation de monde pourri, surprenant par la façon dont s’immisce la violence, soudainement et froidement, mais également grâce à la prestation de Robert Pattinson. L’acteur a déjà prouvé, notamment chez Cronenberg, tout son potentiel, mais il livre ici une prestation extraordinaire dans un rôle complexe de simple d’esprit mais pas si con, de l’actor studio quatre étoiles qui l’impose enfin comme un des acteurs les plus surprenants de sa génération. Et si le film ne cherche jamais à être aimable, il est d’une brutalité et d’une radicalité qui font vraiment plaisir à voir.

Note : 4,5/5

Culturebox

 "The Rover", une équipée sanglante dans le bush australien

Pour son deuxième long-métrage, David Michôd a posé sa caméra dans un bush plus sauvage que jamais, après l'effondrement économique de l'économie mondiale. Ce film violent et surprenant, mené pied au plancher, ne manque pas d'atouts.

Que veut cet homme ?  Récupérer sa voiture ? Bon, d'accord. Mais de là à abattre tous ceux qui entravent ses recherches… Le mystère va mettre du temps à se dissiper, dans les poussières de l'outback. Guy Pearce campe un invraisemblable et impavide taiseux, bientôt épaulé par le génial Robert Pattinson, naïf et émouvant. Entre les deux, ça balance dur : "Vous êtes de la même fente, c'est tout", assène le bourru au jeune homme pour le convaincre que son frère l'a trahi.

 Les cadavres s'accumulent, chez Michôd ça dézingue au moins autant que chez Tarantino. Il y a une arme dans chaque tiroir. L'image est belle, l'ambiance lourde et inquiétante. "The Rover" est un film à forte personnalité, que certains pourront trouver insupportable, en raison de sa violence gratuite notamment.

On pourra, surtout, y voir l'émergence d'un grand réalisateur, capable de tenir le rythme infernal d'un road-movie inspiré, cruel et parfois drôle. Très prometteur. 

Note : 4/5

 Ecran Large

Les rares spectateurs d'Animal Kingdom, premier film de David Michôd, le savaient, ils avaient affaire à un maître en devenir. Il en allait de même pour les amateur de Guy Pearce et Robert Pattinson, se désolant de voir deux excellents comédiens trouver des rôles à leur mesure. Par conséquent, la réunion dans un décor post-apocalyptique de ces trois talents bruts ne pouvait qu'attirer notre attention, à fortiori au sein d'un 67ème Festival de Cannes qui préféra réserver la compétition officielle aux habitués de la Croisette.

Dans une Australie livrée à elle-même suite à une crise économique sans précédent, un anonyme se lance à la poursuite des trois malfrats qui lui ont dérobé son unique bien, sa voiture. Il emmène avec lui le frère d'un d'entre eux, laissé pour mort par ses complices. Au-dessus de ce synopsis simplissime flottent aussi bien les fantômes de Mad Max que les impensés d'une histoire Australienne qui vit s'affronter fils de bagnards et miliciens impitoyables. David Michôd n'entendant pas citer le petit catalogue du cinéma de genre ou de la science-fiction cataclysmique, il se concentre bien évidemment sur cet héritage historiographique. The Rover s'avère donc une fuite en avant d'un nihilisme paralysant, une course contre la vie modelée par les reliefs d'une Australie calcinée. 

Focalisé sur son découpage tour à tour nerveux puis atmosphérique, occupé à confectionner une myriade plans somptueux, David Michôd laisse Guy Pearce et Robert Pattinson s'affronter avec délice. Les deux comédiens se jaugent et se provoquent au rythme d'une valse pathétique, dont l'humanité ressort paradoxalement souillée mais grandie. Le film doit énormément à leur composition qui ne laisse jamais la tension retomber, jusque dans les séquences les plus oniriques de cette infernale balade. Une fois de plus, le metteur en scène fait mine de s'appuyer sur des figures matricielles du Septième Art, pour mieux porter aux nues ses références littéraires et picturales, composant un film total, dont la moindre image éveille chez le spectateur un maelström d'émotions contraires. 

On pourrait s'attarder sur la violence du récit, sa totale absence de pitié, ou le peu de cas qu'il fait d'un spectateur balloté entre exécutions sommaires et massacres en série. Mais The Rover n'a rien d'un film d'exploitation désireux de bander ses muscles. Soutenu par une bande-originale entre musique concrète et détournement pop, le métrage se veut une œuvre de genre capable de repousser les frontières du road trip post-apocalyptique. David Michôd y parvient avec brio, signant ici son premier chef d'œuvre, dont la radicalité et le jusqu'au-boutisme laisseront une partie du public sur le bord de la route, les cordes vocales rompues par un cri d'adhésion ravageur. 

EN BREF : The Rover est un choc absolu, un film d'hauteur qui porte le trip post-apocalyptique vers des hauteurs inconnues et paroxystiques.  

Note : 5/5

Gala

Découverte d'un nouveau Robert Pattinson dans cet impitoyable road movie australien.

Sans foi, ni loi… ni futur. Quand plus aucune autre force que la violence nous régit, que peut-il nous rester ? Tel est l’avertissement du réalisateur et scénariste australien David Michôd, dont le tour de force est de poser un constat, sans jamais se vautrer dans la morale.

Renvoyant son pays natal à son passé de terre nouvelle mais non civilisée, il imagine dans un futur proche marqué par l’effondrement des économies occidentales, au beau milieu d’un bush hostile aux plus faibles, l’équipée désespérée de deux hommes, otages l’un de l’autre.

L’un est un mystérieux fermier, prêt à tout pour récupérer sa voiture qui lui a été volée par trois hommes en cavale. Frère d’un des membres de ce gang, l’autre est un jeune débile, qui, laissé pour mort par les siens sur le bord d’une route, s’impose comme l’unique moyen de retrouver les fuyards. Dépendants l’un de l’autre, ils n’ont pas d’autre choix que de s’apprivoiser. Le syndrome de Stockholm affleure. Mais leur soif de vengeance respective les renverra chacun à cette solitude dont ils sont victimes au début du film…

Apre et brutal, ce deuxième long-métrage de Michôd, acclamé pour son Animal Kingdom en 2011, prend aux tripes et retourne le spectateur avec sa toute dernière scène, révélant le contenu de la voiture volée. Un modèle d’ironie noire ou l’expression d’un terrible nihilisme, au choix.

Héros de ce road movie "camusien", Guy Pearce et Robert Pattinson, méconnaissables, se fondent totalement dans leurs personnages.

Mention spéciale à l’ex-vampire de la saga Twilight, qui, très attendu dans le Maps to the stars de David Cronenberg en compétition, prouve ici aussi sa volonté et surtout sa capacité à mordre à pleines dents dans des projets originaux

Note : 4/4

Trois Couleurs

Après le très réussi Animal Kingdom (2011), portrait d’une famille de hors la loi rongée par la violence, l’Australien David Michôd présente hors compétition The Rover, un road movie erratique avec Robert Pattinson dans le rôle d’un attardé mental sentimental.

Michod plante un décor post apocalyptique convaincant : une zone aride de l’Australie, livrée à la violence et aux pillages, dix ans après l’effondrement de l’économie occidentale. S’y croisent toutes sortes de outlaws patibulaires – il faut reconnaitre au réalisateur un talent certain pour composer un casting de « gueules » : nain receleur, grand-mère maquerelle, types louches armés jusqu’aux dents. Le film démarre en trombe, par une course-poursuite. Dans la première voiture, une brochette de malfrats. Dans la seconde, Eric (Guy Pearce), le propriétaire du premier véhicule, visiblement déterminé à récupérer son bien. Distancé, Eric ramasse l’un des  fuyards au bord de la route, laissé pour mort par ses compagnons. C’est Rey (Robert Pattinson, en quête d’une nouvelle image, très loin du bellâtre ténébreux de Twilight), un brave gars un peu attardé, à l’élocution laborieuse. L’improbable tandem se lance à la poursuite de la voiture volée.

La maladresse naïve de Rey, inadapté à l’univers moribond qui l’entoure (il a peur de tout, sait à peine tenir une arme), fait basculer le film vers un onirisme ponctué d’éclats de violence bruts – une tête qui explose, des cadavres exposés le long des routes en guise d’avertissements. Le cinéaste resserre alors son cadre sur la relation, ambiguë et malaisée, qui se noue entre les deux hommes : l’imbécile aux yeux humides et le solitaire brutal, deux purs spécimens de cette humanité qui périclite, proprement dégénérée. L’aboutissement de la quête des deux héros (retrouveront-ils la voiture ? Que contient son coffre ?) est poussif dans sa volonté de tirer le film vers l’absurde, registre consensuel quand il s’agit de pointer la déliquescence des sociétés modernes (on pense au cinéma de Quentin Dupieux). Reste une mise en scène acérée, cruellement efficace dans sa volonté d’immerger le spectateur dans une atmosphère glauque, poisseuse et crasse.

Allociné

The Rover, encore plus fort qu'Animal Kingdom ?

5 bonnes raisons de voir le film :

- Parce qu'après le troublant Animal Kingdom, on attendait avec la plus grande impatience le nouveau film de David Michôd, et "The Rover" s'avère aussi percutant que son prédécesseur.
- Pour l'atmosphère qui se dégage du film : glauque à souhait, pessimiste, mais également teintée d'un humour grinçant.
- Pour la sobriété du film, pour sa lenteur, toujours rythmée par une BO hypnotisante et des scènes d'action "choc" !
- Pour Guy Pearce, dont le talent et le charisme ne sont plus à prouver.
- Et pour Robert Pattinson, qui livre ici l'une des meilleures interprétations de sa carrière et s'impose comme un grand acteur.

Nonfiction

The Rover, la monstrueuse parade de Pattinson

Présenté hors compétition, The Rover impressionne par sa plastique aride et rugueuse, qui en fait un des polars les plus tendus de ce début de festival. Campé dans un désert australien halluciné, marqué par l'immigration chinoise de ces dernières années et l'extraction minière qui défigure le paysage et attire tout type de faune, The Rover décrit de manière très abrupte la course d'un homme dont on ne sait rien, Guy Pears, à la recherche de sa voiture volée devant ses yeux par un groupe de malfrats. Le désert qu'il traverse aux côtés d'un Robert Pattinson attardé est peuplé de freaks qui ne sont pas sans rappeler les mondes de David Lynch et des frères Cohen. D’une grande violence, taiseux bien qu’animé par une très belle bande son, The Rover brille d’une très belle lueur sombre et mélancolique.

AFP

"The Rover", présenté samedi hors compétition au Festival de Cannes, plonge la Croisette dans une atmosphère sanglante de western de fin du monde, avec le bush australien comme décor halluciné et un duo improbable -Guy Pearce et Robert Pattinson- contraints de faire équipe pour parvenir à leurs fins.

Ce road-trip inspiré se déroule quelques années après l'effondrement des économies occidentales. Les mines australiennes, encore en activité, attirent des hommes désespérés sans foi ni loi, qui se servent de leur arme pour un oui, pour un non. Dans cette société moribonde, survivre est un combat de chaque instant.

(...)

L'Australien David Michôd signe un drame violent et intense, souligné par une belle bande-son et non dénué d'effets drolatiques, comme cette voiture passant sur le toit sous le nez d'Eric sans qu'il cille.

Le jeune réalisateur voulait que son film "révèle un monde parfaitement plausible et envisageable, dans un futur très proche, un monde pillé et asséché par des forces et des systèmes tout à fait réels, qui sont à l'oeuvre partout autour de nous". "The Rover" "parle des problèmes apparemment insolubles de l'avidité humaine face à la destruction de notre environnement, et du désespoir auquel ces forces pourraient pousser les peuples qui luttent pour survivre", comme c'est le cas aujourd'hui au Nigeria ou en Sierra Leone, souligne le cinéaste dans une note d'intention.

Quant à l'impeccable Robert Pattinson, il est en compétition (dans un rôle plus secondaire) avec un autre film à Cannes, "Maps to the Stars", de David Cronenberg, qui sera projeté lundi.

Onlike

Sur le papier, c’est alléchant. Un roadmovie post apocalyptique australien, ça rappelle MAD MAX, et avec David Michôd aux commandes (après son réussi ANIMAL KINGDOM), on s’attendait à voir la poudre parler.

Sur l’écran, le résultat est plus maussade. Bien que Guy Pearce et Robert Pattinson excellent dans leur rôle (le nouveau chouchou de Cronenberg se trouvant là plus d’expressions et de possibilités qu’avant), le film prend le parti de ne pas multiplier les coups d’éclats. Dix ans après l’anéantissement de la civilisation actuelle, un homme (Pearce) entreprend de retrouver ceux qui ont volés son véhicule, et tombe en chemin sur le jeune frère, blessé, d’un des membres du groupe. S’ensuit alors une course poursuite sur des routes désertes, rappelant que l’Australie bénéficie bien de paysages superbes, propices à ce genre de sujets (et ça a déjà été prouvé par le passé).

Si Michôd a des antécédents de films nerveux, il tente ici un arbitrage dangereux entre fond et forme. Sur la forme, THE ROVER multiplie les plans à la lumière savamment choisie et les décors à couper le souffle, sans forcément y arriver à chaque fois. Sur le fond, le récit se sabote de lui-même en n’offrant pas une linéarité parfaite. Un coup sauvage, un coup donneuse de leçon, l’histoire souhaite absolument incorporer à cette aspect de fin du monde de grandes tirades pseudo philosophiques. On n’y comprend pas grand chose, et le rythme s’en ressent. Finalement on termine sur une pointe de déception, et si le tout se tient très bien c’est encore une preuve qu’il faut parfois choisir son camp : film de genre jusqu’au boutiste (surtout avec autant de talents sur le projet) ou film d’auteur épuré. Sans trop savoir, Michôd fonce au milieu, n’offrant finalement ni l’un ni l’autre

Note : 2/5

Cloneweb

En 2011, David Michod nous avait mis une sacrée claque avec Animal Kingdom, pur film de gangsters qui tenait son originalité de son décor banal au possible dans lequel se déroulait toute une série de magouilles toutes plus cruelles et sordides les unes que les autres. L’homme est un loup pour l’homme chez le cinéaste australien, qui n’est pas prêt de changer de discours avec The Rover, ou la traque d’un groupe de voleurs par un Guy Pearce remonté comme jamais. L’occasion de confirmer les espoirs fous fondés sur le réalisateur, et de voir si celui ci confirme l’essai…

The Rover, c’est l’histoire d’un mec qui se fait voler sa caisse.

Ca peut paraître presque réducteur ou cliché, mais c’est réellement ça, à savoir un Guy Pearce qui n’a rien demandé à personne et qui se fait tirer sa voiture par 3 voleurs sortant d’un hold up foiré, où ils ont laissé l’un de leurs compères pour mort.

Manque de bol, le type en question (Robert Pattinson) tient encore debout et va faire équipe avec le héros pour acquérir sa vengeance.

Tenant sur un scénario dépouillé à l’extrême, David Michod va construire son film sur son atmosphère, et un univers presque post-apocalyptique. Sans tomber dans la débandade punk façon Mad Max avec lequel le film partage bien des similitudes malgré le déni de son auteur (fallait pas être australien !), The Rover sait se faire troublant quand il expose un monde qui a cédé sous la tyrannie du capitalisme, et dans lequel le continent asiatique et plus particulièrement la Chine ont pris l’ascendant au point de créer des fossés immenses avec d’autres pays pourtant riches à la base, ici l’Australie.

Devenu un vrai no man’s land, sa géographie désertique n’aidant en rien, le pays que l’on voit ici possède des épiceries qui vendent presque tout dans une optique de survie, et a vu sa population sur le déclin tomber dans une paranoïa totale. Non seulement plus personne ne s’aide, mais en plus ils règlent leurs problèmes à coup de shotgun dans la poire. Vraiment pas accueillant ces australiens.

Dans un décorum tout droit tiré d’un western contemporain, où les véhicules ensablés remplacent les chevaux, le metteur en scène déploie sa toile de fond par petites touches, avec par exemple un train de marchandise marqué de lettres chinoises passant au milieu d’un paysage déserté dans lequel il n’y a plus rien d’autre. Ces détails laissés ça et là, et par ailleurs peu nombreux, suffisent à évoquer la situation mondiale en prenant soin de mettre votre imagination en marche pour le reste. On pourrait presque regretter que cet environnement ne soit pas plus approfondi tant il sert de toile de fond à une intrigue minimaliste. En effet, la chasse à l’homme au centre du film n’est pas riche en rebondissements et repose sur de grands moments de tension. Sauf qu’à trop vouloir monter la sauce, elle finit un peu par se diluer tant la mise en scène a tendance à faire trop long. Limite contemplatif, The Rover semble se laisser aller à la facilité, les paysages désertiques ne demandant qu’à être filmés dans des cadres tous plus beaux les uns que les autres, mais finissant forcément par se ressembler au bout d’un moment. Au milieu de tout ça, le défilé de gueules a bien lieu, et on se réjouit de voir des personnages rongés et usés physiquement, à l’instar d’un Robert Pattinson bien décidé à remodeler son image en incarnant ici une sorte de retardé mental. Guy Pearce quand à lui nous rappelle combien sa carrure et son charisme sont impressionnants, surtout quand il joue les bad ass silencieux et solides comme un roc, et on ne boudera pas notre plaisir sur certaines scènes qui jouent merveilleusement bien la carte de l’électricité dans l’air et des regards assassins et imperturbables, à l’image de la première rencontre entre Guy Pearce et ses ravisseurs. Il est d’ailleurs amusant de voir combien la seule chose qui parvient à mettre un peu en déroute les hommes et leur volonté de fer sont les rares personnages féminins, qui semblent être les seules encore douées d’un peu de bon sens. Seulement la situation n’évolue jamais vraiment au fil d’une œuvre qui a posé ses enjeux en 10 minutes à peine et passe l’heure et demie suivante à les étirer sans jamais les renouveler ou les remotiver. Il y a bien ça et là quelques instants de répit au travers de péripéties chargées en ambiances glauques ou quelques traits d’humour bien évidemment très noir, mais globalement le film peine à se renouveler et étire un peu trop ses scènes sans jamais sortir ses personnages de leurs fonctions initiales. Ca empêche The Rover de dépasser son statut de petit thriller/western anxiogène, malgré une classe certaine.

L’analyse d’une race humaine presque au bout de son parcours d’autodestruction offre à The Rover un théâtre pour le moins passionnant d’autant plus qu’il est présenté avec une subtilité méthodique, mais finalement un peu accessoire à la vue de son histoire.

Dépourvu d’une scène vraiment mémorable et confondant par moment oppression et ennui, le nouveau David Michod est très élégamment filmé tout en sonnant quelque peu vain, son récit peinant à décoller tant il est presque aussi désolé que ses personnages.

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