vendredi 13 juin 2014

Interview de Robert Pattinson pour LA Times (traduction)


Avec l'aide d'un Australien, Robert Pattinson tire un trait sur son passé de vampire

Sur la liste des grands plaisirs de la vie, marcher dans une rue sombre d'un bled paumé en Australie ne doit pas arriver en tête.

Pourtant, si vous êtes l'un des visages les plus connus au monde, cela peut avoir un effet remarquable sur votre psychisme et votre travail.

C'est tout du moins ce qui s'est passé pour l'ancienne star de "Twilight" Robert Pattinson. L'acteur a tourné le nouveau western post-apocalyptique "The Rover" dans une solitude d'un autre monde dans le fin fond Australie - dans de véritables villes fantômes ayant pour noms Leigh Creek et Quorn - lui permettant d'échapper aux nuées exaspérantes et de se concentrer sur son rôle comme jamais auparavant.

"C'était génial, pouvoir être là sans personne autour" se souvient l'idole britannique à propos du tournage du film indépendant de David Michôd qui sort ce vendredi, avant de se mettre à rire de cette façon qui lui est propre : un petit rire nerveux qui décidément n'a rien à voir avec la morosité suave du rôle de vampire qui l'a rendu célèbre.

Comme le dit Michod : "Je ne crois pas avoir jamais vu un acteur aussi heureux que lorsque j'ai vu Rob descendre la rue vers moi tout seul, il sautillait presque".

Peut-être que les grandes stars devraient tourner dans des trous perdus dans le désert plus souvent. Vers la fin de sa période "Twilight" et les deux années qui ont suivi, Pattinson, âgé de 28 ans, a tenté de redéfinir sa carrière à plusieurs reprises. Il a fait un mélodrame romantique, une film d'époque sur un cirque, une adaptation cinématographique d'un roman de Guy de Maupassant.

Pourtant, s'il y a eu des ébauches prometteuses - son étrange introspection dans le rôle d'un magnat de Wall Street dans "Cosmopolis" de David Cronenberg en 2012 - Pattinson n'a jamais montré toute l'étendue de son talent comme il le fait ici.

Celui qui fait la une des tabloïds interprète un homme vulnérable, mais déterminé, laissé pour mort par son cruel frère ainé (Scoot McNairy) dans un désert post-apocalyptique (10 ans après "la révolution"). Il a été capable de puiser au plus profond de lui même pour jouer face Guy Pearce, l'acteur australien qui livre aussi sa plus remarquable prestation depuis plusieurs années.

L'action se déroule dans un monde futuriste qui ressemble au Vieil Ouest désertique et violent faisant penser à "Blade Runner" (même si les comparaisons avec "Mad Max" sont inévitables). The Rover est centré sur Eric (Pearce), un survivant impassible qui semble avoir perdu toute capacité de connexion avec les autres. Lorsque sa voiture est volée par un gang mené par Henry (McNairy), Eric se lance à leur poursuite.

Il rencontre Rey apparemment un peu simple d'esprit (Robert Pattinson), laissé pour mort sur le côté de la route après une altercation avec Henry. Eric et Rey deviennent alors un duo improbable, chacun étant préoccupé pour des raisons qui leur sont propres, mais unis dans leur désir de retrouver l'homme qui leur a fait du tort.

Bien que certains téléspectateurs aient contesté la décision de Michôd, concernant le rythme narratif, le directeur voit son film différemment d'un road movie classique, c'est une exploration au fin fond des personnages à l'image des héros qui vont jusqu'au bout. Pearce et Pattinson échangent quelques mots dans le film, mais ce qu'il faut retenir finalement de The Rover c'est que les liens qui unissent les êtres humains persistent (parfois) malgré l'absence de monde civilisé.

Ces relations, disent les acteurs, leur sont venues naturellement.

"Nous n'avons pas eu besoin de faire d'effort" a déclaré Pearce. "Quand vous vivez comme ça dans une petite ville et rien d'autre à faire hormis le film, une relation ne peut s'empêcher de se développer".

Au moment où il parle, lui et Pattinson se trouvent sur la terrasse du Palais des Festivals à Cannes, installés sur un canapé. Pattinson porte le genre de vêtements mangés aux mites qui semblent tendance chez les gens célèbres.

Mais les acteurs sont se sont mis en quatre pour le film, tourné dans des villes du sud australien que le temps a oubliées et qui ont servi la vision de Michod, la coqueluche indie qui est retournée sur le terrain après ses débuts dans le thriller dramatique "Animal Kingdom", qui mettait également en vedette Pearce, qui lui a valu attention Hollywood.

Pearce faisait du vélo et du jogging tôt le matin avant le tournage, ou tard le soir après des heures de prises, essayant de rester concentré, malgré la chaleur étouffante, sur son personnage qui devait souvent transmettre des émotions complexes sans dire un mot.

Pattinson a passé de longues heures a martelé son accent - un mélange d'accent du Sud exagéré et trainant, de dialecte de l'outback australien et de Lennie Smalls - que lui-même suppose (pas faux) qu'il ne sera peut être pas toujours compris. Il est arrivé aussi en Australie deux semaines plus tôt pour travailler sur le personnage et, pendant le tournage, a fait montre d'une curiosité vis à vis le rôle que ses collègues décrivent comme étonnamment appliquée.

"Je pense que Rob était vraiment motivé et que ça a surpris beaucoup monde" a déclaré l'actrice australienne Susan Prior, qui a une scène clé face aux deux stars du film. "D'une certaine façon, peut-être qu'il n'avait pas connu cela avant, parce que sur les plus gros films, un acteur n'est pas vraiment impliqué dans ce processus d'exploration".

Elle a cité une scène dans laquelle Pattinson a vaillamment accepté de rester allongé et immobile sur une table tandis que le personnage joué par Prior, un médecin, le suturait, et ce malgré le fait qu'il avait une doublure corps et qu'il aurait pu laisser sa place à tout moment. (Le producteur du film, David Linde, dit de Pattinson qu'il est "vraiment curieux intellectuellement".)

Pourtant, travailler sur un film indépendant nécessite certains ajustements pour une star comme Pattinson. Lorsque son agent l'a appelé la première fois pour lui donner des nouvelles de sa conversation avec Michod, Pattinson a cru qu'on lui proposait le rôle. "'Non, non' m'a-t-il dit" se souvient Pattinson, citant son agent "'C'est juste une audition'. Ca a coupé net les réjouissances".

L'acteur, les nerfs en pelote, s'est rendu au domicile de Michod pour passer une audition et il est devenu hésitant quand on lui a demandé de faire une scène qu'il n'avait pas préparée au point qu'il a failli s'en aller. "Rob a dit qu'il ne l'avait pas préparée, mais je pense qu'il ne voulait pas la faire" a déclaré Michod. "Mais nous avons commencé à travailler sur la scène de l'audition, puis c'est devenu un jeu et il s'est senti comme un poisson dans l'eau".

Pattinson a déclaré que malgré le fait d'avoir à passer une audition, il était reconnaissant d'avoir obtenu le rôle dans "The Rover". "J'étais tout à fait conscient que je ne faisais pas partie de ceux qui obtiennent ce genre de rôle" a-t-il dit. "D'après mon expérience, c'est un rôle qui est donné à quelqu'un d'un peu barge".

Il a ajouté "Le un pour nous et un pour eux n'existe plus. Il n'y a aucune garantie de faire un film indépendant après un gros film de studio".

Etant donné qu'il semble qu'il puisse se débrouiller par ses propres moyens, Pattinson a déclaré que les hypothèses sur sa carrière - y compris celles qui racontent régulièrement qu'on lui offre des rôles dans des gros films de studios - sont erronées. "Je n'ai jamais non plus vraiment fait partie de ce groupe" dit-il. "Peut-être parce que je ne m'entraine pas assez physiquement" a-t-il ajouté en faisant à nouveau son petit rire nerveux.

Pearce a dit qu'il n'a pas donné de conseil à Pattinson sur la façon de mener sa carrière ou de faire son métier d'acteur, mais il s'est retrouvé lui-même à s'interroger sur l'aspect célébrité de l'acteur. "Il y avait cette curiosité sur la façon dont Rob fait son travail avec toute l'attention dont il fait l'objet, la façon dont il gère les choses".

Il a raconté qu'il avait dit à Robert Pattinson d'éviter le genre de films, en particulier les plus gros, qu'il pourrait avoir à regretter plus tard, peu importe l'argent ou les conseils de ses agents. "L'humiliation", comme Pearce l'a appelée, n'en vaut pas la peine, et si vous ne le sentez pas, il y a des chances pour que le public ne le sente pas non plus. L'acteur a ajouté que cette philosophie l'a motivé à travailler davantage avec des réalisateurs tels que Michod ou Christopher Nolan dans "Memento", plutôt que de prendre des rôles secondaires de méchants dans des superproductions de studio.

Non pas que Pattinson ait un problème avec ce qui peut mettre dans l'embarras.

Il se sentait tellement bien sur le tournage de The Rover, sans paparazzi à ses trousses, qu'un jour avant le tournage, il a décidé de choquer l'équipe - une spécialité de Pattinson - en se soulageant non loin du plateau, juste hors du champ de la caméra.

"Rob, nous sommes prêts" dit-il, en imitant la voix de l'assistant du réalisateur. "Et quand je suis revenu sur le plateau, je pouvais presque les entendre dire 'Ce mec est bizarre'".

Pattinson a dit qu'il croit que l'intérêt supplémentaire pour lui de faire un film indépendant, réside aussi dans le côté marketing, parce que cela permet à un nouveau public de découvrir le film.

"Ce serait incroyable" dit-il quand on lui demande si certaines de ses fans dévouées sont prêtes à le voir dans un western violent qu'elles ne seraient jamais allées voir dans une autre occasion. Puis il éclate de rire : "Je ne sais pas, je pourrais finir par perdre un tas de fans".

Traduction : RP France

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